Un plat pays...
Aujourd’hui, 5 avril, le mauvais temps s’évacue tout doucement vers l’est, et je ne sais pas à quel rythme.
Je préfère donc aller m’installer suffisamment à l’ouest, dans les Landes, au sud de Sore.
Avec une année 2015 très sèche, je pouvais m’installer partout sans crainte.
Mais cet hiver, il est tombé pas mal d’eau, et les fossés sont pleins.
L’eau est juste 20 à 30 cm sous la surface du sol.
Aussi ai-je arrêté la voiture sur le chemin avant d’entrer dans le champ, pour une reconnaissance à pieds.
En effet, une déclivité s’est transformée en marre à l’entrée du champ, que j’évalue à 12-13 cm de profondeur, à peu près. C’est là que roulent les véhicules, ça devrait être bien tassé, mais avec toute cette flotte….
Je décide de passer, mais vite (et pas rassuré du tout) Je prends un peu de vitesse, et traverse dans une grande gerbe d’eau. Ça passe ! Ouf ! De toute façon, je ne pouvais pas aller plus doucement sans risque.
Dans le champ, on sent que le sol est souple sous les roues. Je reste bien dans la trace.
Je surprends un chevreuil qui s’en va sans hâte. Je fais un demi-tour, en restant bien sur la partie tassée.
C’est alors qu’un autre chevreuil, qui aurait préféré rester caché dans le champ de fougères voisin, décide tout d’un coup de sauter le fossé et de traverser en toute hâte, juste devant la voiture.
Désolé si je dérange !
Une fois en place, montage du 400 D.F., collimation etc…
21H00 la nuit tombe doucement. Je suis surpris de voir que les MMS passent, ce qui est plutôt rare à la campagne.
Les chevreuils mâles (les brocards) se défient de la voix. Ils sont très nombreux ici.
Il fait encore jour. Commençons la soirée par Jupiter. On voit mieux les couleurs de jour. On monte à 225X, mais c’est turbulent. On voit pas mal de choses, mais c’est plus reposant à 150x. Dans les trous de turbu, on voit des ovales blancs dans une des bandes équatoriales ocres et on distingue aussi un genre d’arc irrégulier se détachant sur la bande centrale claire.
21H35 J’ai lu des choses m’ayant mis le doute, à propos d’un reflet sur Sirius.
Donc, en regardant d’abord Rigel, une double à 10’’ d’écartement, j’évalue ce que ça fait à 375X.
Puis, je pointe Sirius, même grossissement, et vérifie ainsi que c’est bien Sirius B que je vois, au même écartement. La compagne est en bas à droite, et se laisse voir dès que la turbu le permet.
On approche maintenant 22H00, il reste une petite brise d’ouest, et un beau ciel étoilé se confirme peu à peu.
Un globulaire est un bon test : M3 n’est pas mal quoique pas très haut et il supporte bien le 8 (225X).
Au nord, le halo de Sore me semble un peu trop présent, signe d’humidité.
Débutons par quelques cibles d’hiver.
D’abord le Casque De Thor (2359) au 12mm + OIII , puis je l’essaie au 31 avec mon nouveau filtre Astronomic OIII en 2’’. Avec ses deux ailes, je le verrais bien sur la tête d’Astérix !
Puis un coup d’œil à Orion, détailler ses filaments, comme un adieu à l’hiver.
22H50 J’avais pointé par les coordonnées, sur mon PSA, un amas de galaxies du Cancer, signalé par Astronomag . : je repère seulement trois galaxies, alors je m’interroge…
Un deuxième essai du OIII 2’’ avec le 42mm sur la Rosette, pour essayer de la voir entière…pas convainquant.
Ca sort mieux au 31. Il faudra attendre la montagne pour refaire ça.
Sans filtre, dans les Gémeaux, je monte la Double Bulle à 375X : la double cacahuète lumineuse, la centrale, des extensions…
Le 1er avril, j’avais regardé le Fantôme de Juju, 3242, qui n’était que bouillie. J’y retourne donc, et à 300X, il laisse voir sa centrale et sa structure interne ovale, lumineuse.
La température est entre 3 et 4 degrés, et il fait déjà bien humide (pas surprenant)
Je me tourne un peu vers la Girafe :
Sur la galaxie 2403, la spirale principale n’apparait que difficilement, en bougeant l’œil devant l’oculaire.
Non loin, sur la Grande Ourse, quasi au zénith, je visite les classiques M82, puis M81, dont la spirale gauche est assez nette et demande peu d’effort.
M109, elle, est toujours difficile. On perçoit néanmoins sa barre, et, de temps en temps, un bout de spirale à gauche.
Minuit : Aïe aïe aïe, on commence à voir des bancs de brouillard dans les environs, il fallait s’y attendre ! Il faut profiter tant qu’on le peut.
La belle M106 ne me déçoit pas : une spirale est évidente, et l’autre, quoique plus faible, est bien visible. J’en fais un petit croquis.
Après le mois de février, j’avais oublié ce qu’étaient de bonnes conditions d’observation !
Bon, là, je suis obligé de sortir le sèche-cheveux 12v et la batterie pour sécher le secondaire, c’est le début.
Des animaux se manifestent : des chevreuils, bien sûr, et d’autres, que je n’identifie pas…
Dans le Lion, je teste la galaxie 2903 : les deux spirales sont visibles sans s’esquinter les yeux, et j’aperçois même un instant le côté double de la spirale de droite. Ayant du mal à y croire, je vérifie dans un bouquin.
Je surveille régulièrement mon secondaire, qui aurait tendance à s’embuer.
00H45 Restons dans le Lion, pour voir le Triplet (M65, M66 et 3628). Sur M66, la double spirale de droite est facile, celle de gauche perceptible par instants. L’ensemble a une forme de ‘‘six’’ très nette.
En revanche, sur M95, 96 et 105, je ne vois aucun détail évident, c’est mauvais signe.
Sur le Septet De Copeland, à 300X, je dénombre les galaxies au début, mais ça semble se gâter, et pour cause : il faut désembuer le secondaire.
Il est 01H30, les nappes de brouillard se baladent toujours.
Bientôt, je vise M99 dans la Vierge, je devine péniblement sa spirale en v.i., et là, ça y est, le brouillard est sur moi.
C’était trop beau, aussi, ça ne pouvait pas durer !
Ce n’est pas que je sois dans le coton, non. Je vois toujours le ciel étoilé, je peux continuer à observer, mais plus au même niveau. Le brouillard doit juste faire 2 ou 3 m d’épaisseur, et ça suffit pour manger de la lumière et perturber les images.
Il aurait fallu qu’on descende en dessous des moins 4 degrés pour faire ‘’fondre’’ le brouillard, comme ça se passait en décembre, mais nous sommes au printemps.
Je vais néanmoins poursuivre en espérant une amélioration.
Je teste donc successivement les Antennes (en plus c’est bas), M64 l’Œil Noir (pas mal), je retente le Septet (là c’est de l’entêtement)
Dans la Chevelure de Bérénice, je tente ‘’The Box’’ , ensemble esthétique de 4 galaxies qui forment un rectangle, et qui mériterait un bien meilleur ciel.
02H45 Dans la vierge, je pointe le quasar 3C 273, grâce à de très bonnes cartes de champ américaines. Un bon seeing ne s’impose pas et pour cause : l’objet est d’apparence stellaire, malgré sa taille. Mais quel phare !!!! Situé à 2,44 MILLIARDS d’a.l., il est certainement l’objet le plus lointain que je puisse voir dans mon scope d’amateur, et ce fut le premier quasar à avoir été découvert.
Quand on y pense : s’il était situé à 30 a.l. de nous, il brillerait dans le ciel autant que notre soleil (qui est à 8mn lumière).
Tout ça me laisse rêveur ! Mon ciel a encore gagné en profondeur. J’avais déjà pointé cet objet le 1er, mais maintenant que je reconnais le champ, ça va beaucoup plus vite.
Il est 03H00 Je suis très couvert bien qu’il ne fasse que moins 1 degré, mais l’humidité est pénétrante. J’ai beaucoup d’occupation car le sèche-cheveux passe tout le temps de mes lunettes au point rouge ou au chercheur, ça n’arrête pas, c’est devenu une bagarre permanente.
Mais je n’envisage même pas de céder !
J’observe sans lunettes, mais quand elles pendent au bout de leur cordon, elles s’embuent, et j’en ai besoin pour repérer et viser les objets.
J’observe tout de même quelques beaux objets, proches du zénith, comme la Baleine(4631), la Crosse De Hockey (4656), M51, plus agréable au 12mm.
En revanche M101, pointée plusieurs fois, est décevante : au mieux, je vois faiblement deux spirales, mais la vue d’ensemble n’est pas bonne.
04H10 Parfois, les nappes refluent et je me reprends à espérer, mais elles reviennent inéluctablement.
Je visite l’Aiguille 4565, M53, et même 5053.
04H30 Mes mallettes sont givrées, il fait moins deux degrés.
J’ai le sentiment que ça s’améliore un peu.
Ainsi, M104, le Sombrero, est agréable, malgré sa faible hauteur. La galaxie NGC5248 (Bouvier) montre facilement ses spirales bien séparées.
De même M3 et M5 me paraissent vraiment beaux. Je regarde aussi le globu 4147, dans la Vierge, car il est souvent oublié, le pauvre !
Restons dans les globus avec M4, son voisin 6144, et enfin M80 (Scorpion), ce dernier non résolu mais esthétique.
Il est 05H00 ; si j’en suis au Scorpion, c’est qu’il est arrivé au méridien et que j’entends bien finir sur du planétaire.
D’abord Mars, à 150X. Surprise, il me montre de façon évidente Syrtis Major et les éclatantes brumes blanches du bassin d’impact de Hélas !
Je trouve l’image un peu turbulente, mais décide néanmoins d’essayer 225X . De plus en plus surprenant, j’obtiens la même image, pas plus turbulente, sans détails supplémentaires, mais en plus gros ! Curieux, j’essaie alors 300X : même phénomène, alors que d’ordinaire, ça aurait dû se brouiller complètement, cette fois il n’en est rien !!
J’ai peut-être une explication : cette sorte de turbulence ne serait due qu’aux gouttelettes de brouillard ( ?)
Ne voyant rien de plus, je décide de passer à Saturne. 300X parait un peu trop, j’aime bien que ça soit stable et net. J’ai donc une image magnifique, lumineuse, à 225X, dont je me délecte un bon moment.
Ça valait vraiment la peine d’attendre pour finir cette session sur une belle note.
Il est 06H15 , température entre moins 3 et moins 4 degrés, il reste encore à ranger, puis se coucher.